La sauvegarde de justice
La sauvegarde de justice est une mesure de protection temporaire, aux effets limités, dans l’attente, soit d’un rétablissement de la personne, soit du prononcé d'une mesure de tutelle ou de curatelle (voire d'une mesure d'habilitation familiale ou d'habilitation entre époux).
Les actes passés pendant une sauvegarde de justice peuvent être remise en cause s'ils portent préjudice aux intérêts de la personne.
Dans sa forme, la sauvegarde de justice peut être médicale (à la demande d'un médecin) ou judiciaire (par ordonnance du juge des tutelles).
Dans ce second cas, le juge des tutelles a la possibilité de désigner un mandataire spécial pour la réalisation de certains actes (par exemple, percevoir les revenus de la personne pour le règlement de ses charges, procéder à la vente d'un bien immobilier, accepter une succession...). Le mandataire peut être un membre de la famille, un proche ou un professionnel MJPM. Il doit rendre compte de sa gestion au terme de son mandat.
La durée d'une sauvegarde de justice est d'une année, renouvelable une fois (qu'elle soit ordonnée par le juge des tutelles ou le résultat d'une décision médicale validée, dans ce second cas, par le procureur de la République),
Le juge des tutelles a également la possibilité de prononcer une mesure de sauvegarde de justice "autonome" : la situation de l'adulte vulnérable ne nécessite pas une mesure de protection juridique mais il a besoin d'être assisté ou représenté pour un acte de disposition précis (cette forme de sauvegarde de justice s'arrête après la réalisation de l'acte).
A noter : nous développons plus en détail la sauvegarde de justice médicale dans une page qui lui est consacrée (en tant qu'alternative aux mesures de protection juridique prononcées par le juge des tutelles).
Adultes-Vulnerables.fr travaille régulièrement à la rédaction et à la mise à jour gratuite de ses contenus. Si vous estimez que ce site vous est utile et que vous souhaitez soutenir son existence, n'hésitez pas à nous apporter votre contribution financière pour un montant de votre choix.
Soutenez-nousEn faisant un versement, même pour le prix d'un café, vous nous encouragez. Merci !
Le principe de la sauvegarde de justice
La sauvegarde de justice, c’est quoi ?
La sauvegarde de justice est une mesure de protection provisoire, qui laisse à la personne majeure sa capacité juridique et la libre gestion de ses intérêts patrimoniaux.
Toutefois, cette mesure la protège des actes qu’elle aurait inconsidérément réalisés (soit par l'annulation de ces actes, soit par leur ré-appréciation > article 435 du Code Civil).
Les différentes formes de la sauvegarde de justice
1/ La sauvegarde de justice médicale (sur demande d'un médecin, demande confirmée par un médecin psychiatre si le patient n'est pas accueilli dans une structure de soins psychiatrique, et après validation par le procureur de la République) cf. notre page sur la sauvegarde de justice médicale.
2/ La sauvegarde de justice par décision judiciaire (ordonnée par le juge des tutelles) et qui se décline en trois possibilités :
- la sauvegarde de justice sans mandat spécial : la personne bénéficie d'un régime de protection juridique sans qu'un représentant légal soit nommé (les actes contraires à ses intérêts pouvant être annulés ou révisés en cas de préjudice)
- la sauvegarde avec mandat spécial : un mandataire est désigné pour la réalisation d'un certain nombre d'actes dans l'attente d'une éventuelle mesure de tutelle ou de curatelle
- la sauvegarde de justice autonome : un mandataire est nommé pour conseiller ou représenter la personne vulnérable pour un acte de disposition précis (par exemple, la vente d'un bien immobilier en indivision ou l'acceptation d'une succession).
A noter : la sauvegarde de justice avec ou sans mandat spécial est la plus souvent prononcée (voir nos précisions un peu plus loin).
Les motifs d’une mise sous sauvegarde de justice
Le juge des tutelles peut ordonner une sauvegarde de justice :
- dans l'urgence :
- soit pour des personnes vulnérables rencontrant d’importants problèmes de santé d’ordre psychique ou physique (si, pour cette seconde raison, le handicap physique empêche l'expression de leur volonté). Par exemple, sur le plan mental, la dégradation importante de leurs facultés cognitives en lien avec des troubles du vieillissement ou la manifestation importante de troubles psychiques ; sur le plan physique, par exemple, des séquelles graves de traumatismes crânien ou d’AVC.
- soit pour des personnes vulnérables qui s’exposent à la perte importante de leurs biens (soit de leur fait, ou soit par des actions frauduleuses de tiers, voire des membres de leur famille ou de proches).
- ou pour ces deux raisons cumulées.
- dans l'attente de compléments d'informations : le juge des tutelles considère que, pour donner suite à une demande de mise sous protection juridique qui s'inscrirait dans la durée (tutelle ou curatelle), il a besoin d'éléments supplémentaires pour pouvoir statuer. Dans cette attente, et au vu de la vulnérabilité - a priori- de la personne à protéger, il ordonne sa mise sous sauvegarde de justice. Le juge peut prononcer un non-lieu à une mise sous protection juridique à son terme.
- pour la réalisation d'un acte de disposition déterminé (acte pour lequel la personne vulnérable ne saurait faire valoir, seule, ses intérêts). Une sauvegarde de justice autonome peut être alors prononcée.
Sauvegarde de justice avec ou sans mandat spécial
Un mandataire spécial peut être désigné par le juge au prononcé d’une sauvegarde de justice. Ce mandataire se voit confier des missions spécifiques selon la situation de l'adulte vulnérable (par exemple, gérer ses ressources et régler ses charges, réaliser un inventaire de son patrimoine, l'assister pour la vente d'un bien immobilier ou le règlement d'une succession...). Pour davantage d'informations sur ce point, vous pouvez vous référer au paragraphe de cette même page consacré à "la sauvegarde de justice avec mandat spécial".
Si la sauvegarde de justice n'est pas assortie d'un mandat spécial, la personne protégée continue à administrer ses intérêts comme elle l'entend, et si besoin, avec l'aide d'un parent ou d'un proche, comme c'est le cas pour la gestion d'affaires, avec la contribution d'une personne de confiance (attention, uniquement pour les personnes accueillies dans un établissement social ou médico-social, dans cette hypothèse), ou avec l'aide d'un tiers professionnel, comme par exemple, un service social de secteur ou spécialisé). Si la personne protégée pose un acte qui n'est pas conforme à ses intérêts, cet acte peut être remis en cause par voie judiciaire (par exemple, faire une donation qui est clairement désavantageuse pour elle, faire des dons d'objets de valeurs ou d'argent de façon inconsidérée, signer un contrat d'emprunt bancaire, alors qu'elle n'en a pas les moyens...).
Sauvegarde de justice, bon à savoir
Protection de la personne et sauvegarde de justice : cette mesure peut concerner également la protection de la personne (seulement si un mandataire spécial est désigné et se voit confier cette mission de protection) cf. notre page sur la protection de la personne protégée et la protection de ses biens.
Durée de la sauvegarde de justice : la durée maximum d'une sauvegarde de justice médicale est de deux ans. La durée d'une sauvegarde de justice ordonnée par le juge des tutelle (avec ou sans mandat spécial) est d'une année, renouvelable, au maximum, une autre année.
Publicité de la sauvegarde de justice : contrairement à une mesure de tutelle ou de curatelle, une mesure de sauvegarde de justice ne fait pas l'objet d'une inscription dans Répertoire Civil (il n’y a donc pas de mention particulière sur l’acte de naissance de la personne protégée). Seul un répertoire est tenu par les services du procureur de la République. L'accès à ce répertoire est limité aux autorités judiciaires, aux proches de la personne placée sous sauvegarde de justice ou à des huissiers, des avocats ou des notaires, sur demande motivée (en dehors des demandes formulées par les autorités judiciaires qui n'ont pas à la justifier). Pour rappel, c'est sur l'extrait de l'acte de naissance de la personne sous tutelle ou sous curatelle qu'apparaît la mention de sa mise sous protection juridique (ce qui n'est pas le cas pour une sauvegarde de justice, qu'elle soit médicale ou décidée par le juge des tutelles).
Coût d'une sauvegarde de justice : elle est gratuite, sauf si un mandataire spécial professionnel est désigné. Dans ce cas, son coût obéit aux mêmes règles que pour une mesure de tutelle ou de curatelle (cf. notre page sur le coût de la mesure de protection) : gratuité si elle est exercée par un membre de la famille ou un proche (à l'exception du remboursement par la personne protégée des éventuels frais avancés), rémunération selon un barème fixé par décret si le mandat spécial est exercé par un professionnel MJPM (mandataire judiciaire à la protection des majeurs).
Réception des courriers en sauvegarde de justice : que la personne soit placée sous sauvegarde de justice médicale ou sous sauvegarde de justice ordonnée par le juge des tutelles, elle continue à recevoir directement ses courriers. L'exception ne peut concerner qu'un mandat spécial mentionnant que le mandataire spécial doit être destinataire des courriers administratifs et bancaires de la personne protégée.
Demande de sauvegarde de justice : l'utilisation du formulaire cerfa 15891*03 > source service-public.fr est vivement conseillée (ce document officiel recense l'intégralité des premières informations à transmettre au juge des tutelles) en l'accompagnant d'une expertise médicale réalisée par un médecin agréé par le procureur de la République. Au sujet des modalités pour solliciter une mesure de protection juridique pour une personne majeure, vous pouvez consulter notre page "La demande de mise sous protection juridique".
La sauvegarde de justice médicale
La sauvegarde de justice médicale, c’est quoi ?
Souvent peu connue (ou assimilée par erreur à la sauvegarde de justice ordonnée par le juge des tutelles), la sauvegarde de justice médicale constitue une alternative légale permettant de protéger les intérêts d’une personne vulnérable ayant de graves problèmes de santé.
Ces problèmes altèrent leurs facultés mentales et/ou leurs facultés corporelles empêchant l’expression de leur volonté :
- soit pour des raisons physiques : par exemple, séquelles de traumatismes crâniens ou d’AVC, coma…
- soit pour des raisons psychiques : par exemple, troubles aigus sur le plan psychiatrique, accentuation des troubles de la mémoire pour une personne âgée…
Les problèmes de santé qui motive sa mise en place peuvent être temporaires ou durables.
Le juge des tutelles n'intervient pas pour sa mise en place.
Intérêt de la sauvegarde de justice médicale
Les actes passés pendant une sauvegarde de justice médicale peuvent être remise en cause s'ils portent préjudice aux intérêts de la personne.
Pour davantage de précision à ce sujet, reportez-vous à nos paragraphes suivants sur "les effets de la sauvegarde de justice" et "les litiges en sauvegarde de justice".
Demande de sauvegarde de justice médicale
Un médecin (voire deux) et le procureur de la République sont les interlocuteurs.
Deux options sont possibles pour la demande d'une sauvegarde de justice médicale et sa validation par le procureur de la République :
- soit la demande est formulée par un médecin traitant, un médecin spécialiste ou un médecin d’établissement (d'un hôpital non-psychiatrique ou d'hébergement, comme par exemple, un EHPAD). Dans ce cas, la demande doit être accompagnée d'un certificat médical d’un médecin psychiatre (celui-ci attestant, soit de l’altération des facultés mentales de la personne à protéger, soit de l’altération de ses facultés corporelles empêchant l’expression de la volonté, conformément à l'article 425 du Code Civil).
- soit la demande est réalisée par un médecin psychiatre dès lors qu’il constate que le patient accueilli dans son établissement nécessite d’être protégé du fait de l’altération de ses facultés (mentales ou corporelles si celles-ci empêchent l’expression de sa volonté).
Dans ces deux hypothèses, le médecin adresse sa demande de sauvegarde médicale au procureur de la République Celui-ci l’enregistre si la procédure est conforme.
La possibilité d'une sauvegarde de justice médicale peut, bien sûr, être évoquée par la famille, un proche ou un tiers, auprès du médecin concerné, qui en appréciera l'opportunité.
Sauvegarde de justice médicale, bon à savoir
Recours contre une mise sous sauvegarde de justice médicale : la personne placée sous sauvegarde de justice médicale peut exercer un recours gracieux auprès du procureur de la République (dans le cadre d'une demande de radiation).
Durée de la sauvegarde de justice médicale : deux ans au maximum. Si la sauvegarde médicale a été décidée pour une durée inférieure à ce délai, le renouvellement est effectué par le médecin qui en donne l’information au procureur de la République.
Fonctionnement bancaire en sauvegarde de justice médicale : la personne continue d’utiliser ses comptes bancaires et ses moyens de paiement de façon autonome.
Fin de la sauvegarde de justice médicale :
- si la fin des troubles psychiques ou de la pathologie physique l'ayant motivée est attestée par le médecin auprès du procureur de la République
- si une mesure de protection juridique est ordonnée par le juge des tutelles (sauvegarde de justice avec mandat spécial, curatelle, ou tutelle) ou un régime d'habilitation (habilitation familiale ou habilitation entre époux)
- si le recours formulé par la personne est accepté par le procureur de la République (radiation de la sauvegarde médicale)
- si la personne, qui en bénéficie, décède.
Pour obtenir davantage d'informations au sujet de la sauvegarde de justice médicale, vous pouvez consulter notre page qui y est consacrée, dans le cadre des alternatives légales avant une éventuelle mesure de protection juridique : sauvegarde de justice ordonnée par le juge des tutelles, curatelle ou tutelle, voire une habilitation familiale ou une habilitation entre époux).
La sauvegarde de justice sans mandat spécial
La sauvegarde de justice sans mandat spécial, c'est quoi ?
Lorsque la situation de grande vulnérabilité d'une personne adulte l'impose, le juge des tutelles peut décider de la placer sous sauvegarde de justice sans mandat spécial afin de préserver ses intérêts.
Le juge procède par ordonnance, c’est-à-dire qu’il la décide seul au regard de la nécessité d’apporter une solution provisoire et rapide à une situation qui pourrait davantage se dégrader.
Le juge n’est pas contraint de procéder à l’audition de la personne protégée ou à celle d’autres personnes (contrairement à une procédure de tutelle ou de curatelle qui conduit à un jugement et non à une ordonnance).
Il s'agit souvent d'une décision prise dans une certaine forme d'urgence, à défaut de bénéficier des délais nécessaires pour l'instruction d'une mesure de protection plus pérenne.
Cette priorité à protéger la personne est alors constatée par le juge des tutelles :
- soit sur un plan médical si une sauvegarde de justice médicale n'a pas été prononcée (par exemple, dans le cas d'une maladie très invalidante, de séquelles d'un grave accident ou d'un coma ne permettant plus à la personne de pourvoir à ses intérêts)
- soit parce que le patrimoine de la personne peut être menacé (en raison de sa propre attitude ou de celle de tiers mal-intentionnés)
- ou pour ces deux motifs : gravité des problèmes de santé associé à des risques de dilapidation du patrimoine.
L'absence de désignation d'un mandataire spécial, pourquoi ?
- il n'y a pas d'actes urgents à réaliser (par exemple, un acte de disposition relatif au patrimoine de la personne à protéger)
- les capacités de gestion administrative, budgétaire et patrimoniale de la personne à protéger restent - a priori - satisfaisantes (si ce n'était pas le cas, un mandataire spécial serait alors nommé pour cette gestion > cf. notre paragraphe suivant)
- la personne vit dans un environnement qui semble suffisamment sécurisé en bénéficiant d'aides telles que la gestion d'affaires, un système de procurations et/ou la désignation d'une personne de confiance (dans ce dernier cas, uniquement si elle est accueillie dans un établissement ou si elle est accompagnée par un service social ou médico-social). En dehors ces aides éventuelles, si l'adulte vulnérable est hospitalisé dans la durée ou s'il est suivi de façon régulière à son domicile sur le plan médical, le juge pourra considérer que ce contexte de vie est suffisamment sécurisé pour ne pas désigner un mandataire spécial.
La sauvegarde de justice sans mandat spécial, un moyen d'évaluation et de diagnostic
Elle permet au juge des tutelles d'apprécier la situation globale de la personne protégée en vue d'une éventuelle mesure de curatelle ou de tutelle.
Le juge peut solliciter, auprès de toute personne, des informations supplémentaires pour son travail d'investigation.
A son terme ou avant, si l'état de santé de la personne s'est améliorée, il peut prononcer un non-lieu à une mesure de protection (la personne protégée retrouve son autonomie).
Les effets de la sauvegarde de justice sans mandat spécial
Les actes inconsidérément passés par la personne durant la sauvegarde de justice peuvent être remis en cause : soit par leur annulation (rescision pour lésion), soit par leur ré-appréciation (réduction pour excès) cf. article 435 du Code Civil.
Pour en savoir davantage, référez-vous à nos paragraphes de cette même page sur "les effets de la sauvegarde de justice" et "les litiges en sauvegarde de justice".
La demande de mise sous sauvegarde de justice, sans mandat spécial
Cette demande est :
- soit formulée par un parent ou par un proche (elle est alors présentée directement au juge des tutelles) en remplissant le formulaire de demande cerfa 15891*03 > source service-public.fr et en y joignant une expertise médicale d'un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République)
- soit requise par le procureur de la République qui la transmet au juge des tutelles (le procureur a été informé, par des tiers, d'éléments préoccupants qui motive sa demande).
En cas d'urgence, le juge des tutelles peut prononcer la sauvegarde de justice sans avoir auditionné la personne à protéger (il l'entend, ensuite, sauf si son état de santé ne permet pas son audition).
La sauvegarde de justice sans mandat spécial, bon à savoir
Recours : aucun recours n'est possible
Durée : un an, renouvelable une fois. La sauvegarde de justice devient caduque si elle n'a pas été renouvelée avant le terme d'une année, ou au terme maximum des deux années possibles.
Fonctionnement bancaire en sauvegarde de justice sans mandat spécial : la personne protégée continue d’utiliser ses comptes bancaires et ses moyens de paiement de façon autonome.
Fin de la sauvegarde de justice sans mandat spécial ordonnée par le juge des tutelles :
- si le juge des tutelles prend la décision d'y mette fin dans le cadre d'un "non-lieu à une mise sous protection juridique" (la personne retrouve son autonomie du fait de l'amélioration de son état de santé)
- si le juge des tutelles prononce la mise sous curatelle ou sous tutelle de la personne protégée (ou la place sous un régime d'habilitation familiale ou d'habilitation entre époux)
- si la personne, qui en bénéficie, décède.
La sauvegarde de justice avec mandat spécial
La désignation d’un mandataire spécial en sauvegarde de justice
Dans le cadre d'une sauvegarde de justice, le juge des tutelles a la possibilité de désigner un mandataire spécial lorsque des actes urgents ou spécifiques doivent être accomplis. La personne protégée n'a pas la capacité de les réaliser seule (soit en l'assistant, soit en la représentant).
La mission du mandataire est alors délimitée et clairement précisée dans l'ordonnance qui est rendue (par exemple : gérer les revenus de la personne, régler ses dépenses, procéder à la vente d'un bien immobilier, déposer un dossier de surendettement, assurer les moyens de sa défense dans le cadre d'une action en justice...).
Avant la fin de son intervention, il est demandé au mandataire spécial d'établir un rapport circonstancié à l'attention du juge des tutelles. Ce rapport fait état des actions menées et il a pour objet de donner un avis sur le devenir de la sauvegarde de justice : doit-elle être renouvelée, doit-elle s'achever, faut-il envisager pour la personne protégée une mesure de curatelle ou de tutelle, ou bien encore, d'autres alternatives sont-elles possibles ?
Si le juge estime qu'une mesure de tutelle ou de curatelle doit être prononcée, le mandataire spécial peut être désigné curateur ou tuteur (qu'il s'agisse d'un membre de la famille, d’un proche ou d'un professionnel MJPM). Le juge des tutelles peut également désigner une personne différente que le mandataire spécial (par exemple, si le mandataire spécial est un professionnel MJPM, il est remplacé par un membre de la famille ou un proche qui exerceront le mandat de tutelle ou de curatelle).
Important : la désignation d'un mandataire spécial est facultative et reste à l'appréciation du juge des tutelles. Le placement d'une personne majeure sous sauvegarde de justice, sans mandat spécial, peut, en quelque sorte, "se suffire à lui-même" (la personne est sous sauvegarde de justice sans qu'une personne n'intervienne pour elle) cf. notre paragraphe précédent.
Qui peut être désigné mandataire spécial ?
Pour désigner le mandataire spécial, la priorité est donnée à la famille : en premier lieu, le conjoint, le partenaire de PACS ou le concubin est désigné, et, à défaut, un autre membre de la famille ou un allié. Enfin, toute personne résidant avec le majeur ou entretenant avec lui des liens étroits ou stables, appelé encore "proche", peut être désigné en tant que mandataire spécial.
Le juge a cependant la possibilité de ne pas confier ce mandat à l’un des membres de la famille ou l'un de ses proches en cas de conflits manifestes, d'éloignement géographique ou pour toute autre raison présentant un risque pour la personne à protéger. Dans ce cas, un mandataire judiciaire à la protection des majeurs (MJPM) est désigné. Il s'agit, soit d'une association, soit d'un préposé d’établissement, soit d'un mandataire judiciaire privé.
A la fin de la période de sauvegarde de justice, le mandataire spécial doit rendre compte de sa gestion auprès du greffe du tribunal judiciaire (ou du tribunal de proximité. Sa mission s'achève alors.
Les effets de la sauvegarde de justice avec mandat spécial
Si un mandat spécial est prononcé (comme pour la sauvegarde de justice médicale ou celle ordonnée par le juge des tutelles), les actes posés par la personne protégée peuvent être remis en cause s'ils desservent ses intérêts : annulation (rescision pour lésion) ou ré-appréciation (réduction pour excès), par voie amiable ou judiciaire > cf. article 435 du Code Civil.
A ce sujet, vous pouvez consulter nos paragraphes de cette même page : "les effets de la sauvegarde de justice" et "les litiges en sauvegarde de justice".
Les effets sont par ailleurs la réalisation des missions prévues dans le mandat spécial (ou en cours de réalisation au terme du mandat).
Par exemple : le bilan effectué sur la situation financière et administrative de la personne protégée et sa capacité à la gérer ; le point sur une situation d’endettement et les solutions envisagées ; la vente d’un bien immobilier…
La demande de mise sous sauvegarde de justice avec mandat spécial
Pour la demande d’une sauvegarde de justice avec mandat spécial, les modalités sont identiques à celles d’une demande de sauvegarde de justice sans mandat spécial :
- soit formulée par un parent ou par un proche (elle est alors présentée directement au juge des tutelles) en remplissant le formulaire de demande cerfa 15891*03 > source service-public.fr et en y joignant une expertise médicale d'un médecin inscrit sur la liste du procureur de la République)
- soit requise par le procureur de la République qui la transmet au juge des tutelles (le procureur a été informé, par des tiers, d'éléments préoccupants qui motive sa demande).
En cas d'urgence, le juge des tutelles peut prononcer la sauvegarde de justice sans avoir auditionné la personne à protéger (il l'entend, ensuite, sauf si son état de santé ne permet pas son audition).
La sauvegarde de justice avec mandat spécial, bon à savoir
Recours : aucun recours n'est possible pour la mise sous sauvegarde de justice mais un recours est possible sur le choix du mandataire ou sur le contenu de ses missions. En cas de recours, le mandat est quand même mis en œuvre dès l'ordonnance du juge (sauf si celle-ci ne mentionne pas d'exécution provisoire).
Durée : un an, renouvelable une fois. La sauvegarde de justice avec mandat spécial devient caduque si elle n'a pas été renouvelée avant le terme d'une année, ou au terme maximum des deux années possibles.
Fonctionnement bancaire en sauvegarde de justice avec mandat spécial : tout dépend des missions confiées au mandataire spécial. La personne protégée continue d’utiliser ses comptes bancaires et ses moyens de paiement sauf si le mandataire spécial se voit confier un mandat de gestion de ses ressources.
Fin de la sauvegarde de justice avec mandat spécial :
- si le juge des tutelles prend la décision d'y mette fin dans le cadre d'un "non-lieu à une mise sous protection juridique" (la personne retrouve son autonomie et sa pleine capacité juridique du fait de l'amélioration de son état de santé)
- si le juge considère que la mission du mandataire est achevée (la sauvegarde de justice, seule, pouvant être maintenue)
- si le juge des tutelles prononce la mise sous curatelle ou sous tutelle de la personne protégée (ou la place sous un régime d'habilitation familiale ou d'habilitation entre époux)
- si la personne, qui en bénéficie, décède.
La sauvegarde de justice autonome
La sauvegarde de justice autonome, c’est quoi ?
En dehors de la situation d'urgence qui prévaut le plus souvent pour la désignation d'un mandataire spécial, le juge des tutelles a également la possibilité de désigner un mandataire spécial, dans le cadre d'une sauvegarde de justice autonome.
Il s'agit des situations où l'adulte vulnérable, bien entouré par sa famille dans le cadre d'une gestion d'affaires et d'un système de procurations, a besoin d'être assisté ou représenté, de façon spécifique, pour un ou des actes de disposition (ceux touchant à son patrimoine).
Par exemple :
- l'acceptation d'une succession
- la vente d'un bien immobilier
- une opération bancaire ne pouvant être réalisée dans le cadre des procurations en place...
Le juge des tutelles peut alors désigner, dans ce cas, soit un membre de la famille (ou un proche), soit un professionnel MJPM, en tant que mandataire spécial.
Ce mandataire spécial sera chargé de réaliser la mission qui lui est confiée, soit en assistant, soit en représentant la personne protégée.
La demande de sauvegarde de justice autonome
Le formulaire cerfa 15891*03 > source service-public.fr est à compléter en transmettant au juge des tutelles toutes les informations utiles au sujet de l'acte à réaliser (documents notariés par exemple).
La demande doit être accompagnée d'une expertise médicale réalisée par un médecin agréé par le procureur de la République.
Durée de la sauvegarde de justice autonome
Cette forme de sauvegarde de justice avec mandat spécial prend fin dès que la (ou les) mission(s) prévue(s) a ou ont été réalisée(s).
Le mandataire spécial doit en informer le juge des tutelles pour la cessation de son mandat (ce qui met un terme à la sauvegarde de justice autonome).
Alternative à la sauvegarde de justice autonome
L'introduction, en 2016, de l'habilitation familiale (sous une forme limitée) est une alternative à ce type de mesure (à condition que les membres de la famille s'entendent sur son principe et la désignation de la personne habilitée), sous réserve de la décision du juge des tutelles.
Les effets de la sauvegarde de justice
Un principe général de validité des actes passés en sauvegarde de justice
Les actes passés pendant une mesure de sauvegarde de justice sont par principe valables.
La personne protégée conserve en effet sa pleine capacité juridique
Par exemple, l'achat d’une voiture, la vente d’une maison, la souscription d'un contrat assurance-vie, se marier…
La possibilité d’une remise en cause des actes passés en sauvegarde de justice
Si les actes passés par la personne sous sauvegarde de justice sont contraires à ses intérêts, ils peuvent être annulés ou ré-appréciés :
- soit par voie amiable (par exemple, le vendeur d'une voiture accepte de reprendre son véhicule)
- soit par le biais d'une action judiciaire (par exemple, aller en justice pour contester la vente ou la donation d'un bien immobilier).
Dans le cas d'une action judiciaire :
- l'acte peut être annulé s'il est prouvé qu'il a été conclu sous l'emprise d'un trouble mental (article 414-1 du Code Civil), s'il concerne un acte pour lequel un mandataire spécial a été désigné (article 437 du Code Civil) ou si le contrat est manifestement déséquilibré et injuste pour la personne sous sauvegarde de justice (rescision pour lésion, article 435 du Code Civil)
- l'acte peut être ré-apprécié, c'est à dire, faire l'objet d'une réduction pour excès (article 435 du Code Civil). L'acte en lui-même n'est pas remis en cause sur le fond, mais sur sa forme (par exemple, revoir de façon plus équilibré le montant d'une transaction pour la vente d'un bien).
Attention :
- seule la personne sous sauvegarde de justice peut entamer une procédure en annulation, en rescision ou en réduction, ou ses héritiers (dans un délai maximum de cinq ans, à compter de la conclusion de l'acte ou de la signature d'un contrat).
- si la personne n'est pas en mesure de le faire elle-même, un signalement peut être effectué auprès du procureur de la République par un membre de la famille, un proche, un tiers (professionnel ou non).
A noter : si un mandataire spécial a été désigné, il informe le juge des tutelles de la procédure (l’assistance d’un avocat est conseillée pour l’action judiciaire à mener).
Pour en savoir davantage sur la validité des actes en sauvegarde de justice, reportez-vous à nos pages sur les droits et responsabilités de la personne majeure protégée : les droits civils et civiques des majeurs protégés, les droits de la personne majeure protégée, les droits patrimoniaux des majeurs protégés, le domaine de la santé et les majeurs protégés et la responsabilité civile et pénale des majeurs protégés (en cliquant sur l'onglet "sauvegarde de justice" de chacun des tableaux proposés).
Fonctionnement bancaire en sauvegarde de justice
La personne placée sous sauvegarde de justice conserve son autonomie de fonctionnement bancaire.
L’exception est celle d’un mandat spécial décidé par le juge des tutelles qui confère au mandataire désigné la gestion des ressources de la personne protégée (c’est par exemple le cas des situations où la sauvegarde de justice est décidée en urgence pour sécuriser les avoirs bancaires de la personne protégée).
Dans cette situation, un compte de gestion au nom de la personne protégée permet au mandataire spécial de régler ses charges et de lui verser sur un compte de retrait les sommes nécessaires pour répondre à ses besoins.
Pour les modalités pratiques du fonctionnement bancaire en sauvegarde de justice, reporter-vous à notre page sur « Les actes à effectuer au début de la mesure de protection » (paragraphes « La notification de la mesure de protection aux banques » et « Le fonctionnement bancaire pour les majeurs protégés »).
Les droits de la personne sous sauvegarde de justice, en résumé
Liste non-exhaustive :
- droits civils : droit commun en dehors des demandes en divorce (article 249-3 du Code Civil)
- droits patrimoniaux : droit commun sauf pour le droit de disposer de son logement (par sa vente ou la rupture de son bail locatif), l'autorisation du juge des tutelles étant alors nécessaire (article 426 du Code Civil)
- droits civiques : droit commun (sauf pour être juré d'une cour d'assise, en application de l'article 256 du Code de Procédure Pénale)
- droits de la personne : droit commun (mais avec une interdiction pour les recherches bio-médicales > article L1122-2 du Code de la Santé Publique) ; interdictions si en sauvegarde de justice avec mandat spécial la personne protégée est représentée : pour les dons d’organe (L1231-2 du Code de la Santé Publique), pour le don du sang (L1221-5 du CSP) et le prélèvement de tissus humain (L1241-2 du CSP)
- responsabilité pénale : droit commun avec les dispositions relatives aux personnes majeures protégés (article 706-117 du Code de Procédure Pénale).
Le traitement des litiges en sauvegarde de justice
Rappel sur la capacité juridique en sauvegarde de justice
En sauvegarde de justice (qu'elle soit médicale ou judiciaire), la personne conserve sa pleine capacité juridique à poser des actes.
Les limites à cette capacité ne concernent que :
- celles qui sont restreintes par la loi (par exemple, l'impossibilité de faire une demande en divorce, de procéder à la vente de sa résidence principale ou de participer à un jury d'assises)
- celles qui sont prévues par l'assistance ou la représentation du mandataire spécial (quand la sauvegarde de justice est ordonnée par le juge des tutelles avec un mandat spécial).
Litige avec un tiers et sauvegarde de justice
En sauvegarde de justice, un acte posé par une personne sous sauvegarde de justice peut faire l’objet de litiges avec un tiers.
L'acte peut être annulé ou ré-apprécié, dans un délai maximum de cinq ans à compter de la date de sa conclusion (cf. notre paragraphe précédent sur "les effets de la sauvegarde de justice") :
- soit parce que l'acte est contraire aux intérêts de la personne protégée (par exemple, la conclusion d'un contrat qui lui est préjudiciable)
- soit parce qu'il crée un préjudice pour le tiers (ou les tiers) concerné(s) (par exemple, la personne protégée n'honore pas les termes d'un contrat qu'elle a signé).
Dans ce cas, et comme pour tout litige, soit un accord amiable est trouvé, soit une action judiciaire est entamée.
A noter : les actes passés moins de deux ans avant une ordonnance de sauvegarde de justice peuvent être remis en cause si est prouvé qu'ils ont portés atteinte aux intérêts de la personne protégée (article 464 du Code Civil).
Litige entre la personne protégée et le mandataire spécial
Les actions menées par le mandataire spécial peuvent être contestées par la personne sous sauvegarde de justice (ou l'inverse).
Dans cette hypothèse :
- la personne sous sauvegarde de justice ou le mandataire spécial peuvent saisir le juge des tutelles.
- le juge arbitre le différend qui les oppose (par exemple, dans l'hypothèse d'un mandat de gestion des ressources de la personne protégée, celle-ci conteste le montant des sommes qui lui sont allouées par son mandataire).
Textes de référence
Sur la sauvegarde de justice médicale : article L3211-6 du Code de la Santé Publique
Sur la sauvegarde de justice ordonnée par le juge des tutelles : articles 433 à 439 du Code Civil
Sur la désignation d'un mandataire spécial par le juge des tutelles (dans le cadre d'une sauvegarde de justice) : article 437 du Code Civil
Sur la procédure concernant la mise sous sauvegarde de justice (par un médecin ou par le juge des tutelles) : articles 1248 à 1252-1 du Code de Procédure Civile
Sur les actions en annulation, en rescision ou en réduction : article 435 du Code Civil
Sur l'impossibilité d'une personne sous sauvegarde de justice d'entamer une procédure en divorce : article 249-3 du Code Civil
Sur l'impossibilité d'une personne sous sauvegarde de justice de vendre seule son logement ou de résilier seule son bail locatif : article 426 du Code Civil
Sur l'impossibilité d'une personne sous sauvegarde de justice d'être juré en cours d'assise : article 256 du Code de Procédure Pénale
Sur la fin de la sauvegarde de justice : article 439 du Code Civil
Sur les droits et libertés de la personne majeure protégée : Charte des droits et libertés de la personne majeure protégée
Sites Internet
Sur la sauvegarde de justice : service-public.fr
Formulaire de demande de protection juridique pour une personne majeure : cerfa 15891*03 > source service-public.fr
Nos pages internes
Adultes-Vulnerables.fr travaille régulièrement à la rédaction et à la mise à jour gratuite de ses contenus. Si vous estimez que ce site vous est utile et que vous souhaitez soutenir son existence, n'hésitez pas à nous apporter votre contribution financière pour un montant de votre choix.
Soutenez-nousEn faisant un versement, même pour le prix d'un café, vous nous encouragez. Merci !